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Le blog d'electric girl

Interview de François de François & The Atlas Mountain #NJP2014

10 Octobre 2014, 18:29pm

Publié par electric girl

Dans le cadre du festival Nancy Jazz Pulsations qui a lieu en ce moment (voir ma sélection de concerts ici), j’ai pu interviewer hier soir François du groupe François & The Atlas Mountain avant leur live à Lyon.

Le groupe sera ce soir en concert à L’Autre Canal avec Brigitte (leur 1ère date de tournée !) et Julien Bouchard que j’ai interviewé mardi (interview à lire ici). Je serai présente au concert donc vous aurez droit à un live report/une revue concert bientôt.

Je ne pense plus qu’il soit nécessaire de présenter ce groupe vu que la presse en parle de plus en plus (surtout depuis 2/3 ans). Et comme l'interview est longue, si vous ne les connaissez pas encore, je vous laisse aller voir leur fiche wikipédia ou autre.

J’ai un peu changé mon mode d’interview cette fois. J’ai voulu concevoir cela plus comme une discussion que comme un jeu de questions réponses. Donc j’avais préparé quelques questions au cas où mais je voulais surtout établir un réel échange sur ses envies et aspirations, sa vision de la musique et de l’industrie musicale, etc. J’espère que ce format vous plaira. Par contre, l’interview est assez longue du coup.

 

Qu’est-ce qui t’as donné envie de te lancer dans la musique sachant que tu as pas mal d’autres facettes (peintre, etc) ? C’était pour pouvoir mettre en musique tes textes ou, au contraire, tes textes sont venus après avoir choisi de faire de la musique ?

Non, les deux sont venus ensemble. C’était plutôt une sorte d’énergie globale qui me plaisait quand je voyais des groupes ou que j’écoutais des groupes que j’aimais.


Est-ce qu’il y a un groupe ou artiste qui t’a donné envie de faire de la musique ton métier et pas une simple passion ?

Il y en a eu plusieurs. Ce choix s’est fait progressivement : j’avais des rêves, j’adorais la musique –par exemple j’adorais Nirvana- et puis je ne pensais pas que j’allais pouvoir faire des concerts de ma vie mais petit à petit il s’est trouvé que ça a été possible.


Au départ, tu pensais que c’était un rêve irréalisable ?

Voilà, c’est ça. C’était un rêve et puis petit à petit c’est devenu une réalité. Au début c’était dans des lieux très petits, plus intimes et petit à petit dans des lieux un peu plus intéressants et importants.


Je t’ai d’ailleurs vu il y a un peu plus d’un mois à Rock En Seine. Est-ce que le fait de faire ce type de festivals représente une sorte de consécration pour toi, de même que le fait d’avoir été signé par Domino ? Ou tu essayes de relativiser les choses qui arrivent actuellement au groupe ?

Je relativise car ça ne s’est pas fait du jour au lendemain, c’était un long parcours.


Oui, ça fait pas mal d’années que le groupe existe et pas énormément d’années que le groupe est vraiment mis sur le devant de la scène, peut-être grâce à des chansons plus pop aux rythmes plus marqués. Est-ce que le groupe a un peu changé de fonctionnement ou vous êtes restés dans la même lignée et c’était juste le nombre d’années nécessaires pour se forger un public fidèle ?

Oui, c’était le temps de se faire un public. Ça s’est fait petit à petit. Les personnes qui m’ont mis en avant, les radios, les journalistes, les magazines, il y en a certains qui m’ont découvert il y a très très longtemps et qui ont essayé de me soutenir et ça a mis du temps pour que le nom se fasse connaître. Ça s’est fait grâce aux concerts et aux festivals. J’ai commencé mon parcours en rentrant par la petite porte, ça a été assez long et c’est toujours en cours.

 

crédit : figaro.fr


Et justement par rapport à ta carrière et au groupe, tu as aussi sorti des albums en solo –le dernier date de 2008 si je me souviens bien. Tu mets de côté cette carrière solo ou tu as encore envie de la développer ou de t’investir dans des projets autres que François & The Atlas Mountain ?

J’ai envie de collaborer dans plein de projets, notamment avec des metteurs en scène, des conteurs, d’autres groupes, j’ai envie de me laisser le temps de peindre, etc. J’ai plein de centres d’intérêts et d’envies diverses. Après, c’est vrai que je me suis énormément focalisé sur cette formule, François & The Altas Mountain, cette formule qui nous permet de voyager, de nous produire, etc. C’est une formule qui me correspond bien en ce moment.


Donc c’est ton envie actuelle mais penses-tu vouloir continuer longtemps cette formule ou t’orienter vers d’autres choses ?

Je pense que François & The Altas Mountain existera toujours, mais qu’en parallèle je continuerai à faire d’autres choses. J’ai déjà joué dans pas mal de groupes, notamment dans Petit Fantôme.


Beaucoup de journalistes définissent ta musique comme de la poésie pop en français. Cela te fait-il plaisir que l’on associe ta musique à de la poésie ou justement n’est-ce pas un peu antinomique d’associer pop et poésie ? Car la pop notamment anglo-saxonne est plutôt associée à des chansons simples aux paroles souvent peu élaborées mais très facile à écouter et aux rythmiques imparables. As-tu essayé de briser les codes de la pop pour y apporter une touche plus poétique ?

Ce sont plutôt des envies. Je n’ai pas cherché à caser des mots savants à tout prix. J’ai juste eu envie de me faire plaisirs en écrivant avec de beaux mots, des mots qui me touchaient, qui créaient une émotion chez moi. Je peux utiliser des mots simples comme le vent, la mer tout comme je peux utiliser des mots plus compliqués tant que ces mots me touchent.


Par rapport à ton label, Domino, est-ce que le fait d’avoir été signé par un label aussi prestigieux dans la pop-rock anglo-saxonne –The Kills, etc- a donné un nouvel élan au groupe ?

Oui, bien sûr. Ça a surtout mis les auditeurs et les critiques musicaux en confiance.


Oui, c’est un petit peu comme un label montrant la qualité d’un groupe.

Oui, ça facilite le travail. C’est-à-dire que, plutôt que d’être tout seul dans notre coin, il y a des gens qui nous soutiennent, ça créer du dynamisme.

 

 


Ce soutien a-t’il modifié la manière de fonctionner du groupe, par exemple en ayant plus de moyens et de temps pour les enregistrements ?

Pas vraiment. Au niveau du temps d’enregistrement non, au niveau des moyens à peine. Ça surtout créé la possibilité de tourner.


Et justement, apprécies-tu le fait de tourner plus, de pouvoir réellement voir évoluer ta musique sur scène devant ton public ?

Oui, c’est génial d’avoir l’opportunité de pouvoir jouer tous les soirs. Bon, on ne joue pas vraiment tous les soirs mais presque et j’apprécie vraiment cela.


Y-a-t ’il une étape de réflexion entre la finalisation de l’album et la tournée pour savoir comment tu vas adapter l’album sur scène ?

Non, ça se fait naturellement parce qu’on a commencé à tourner juste après l’enregistrement de l’album précédent pendant 2 ans et demi, puis on a eu peut-être trois mois de pause avant de répéter le dernier album, qu’on a ensuite enregistré en environ 10 jours avant de reprendre la tournée.


Du coup, tu composes un peu tout le temps ?

Oui, c’est ça.


Maintenant, tu as un public assez fidèle. Est-ce que tu vas te limiter dans certains choix ? Par exemple, choisir de ne pas sortir tel ou tel titre car il ne correspond pas aux attentes du public.

Non, on n’a pas ce type de dynamique. On est très libre, et je pense que c’est ce que notre public aime aussi.


Tu es aussi peintre.

Peintre c’est un grand mot.


On va dire que tu fais de la peinture et que tu aimes beaucoup la peinture. Est-ce que du coup l’image que renvoie un groupe (affiche, logo, look, etc) est importante pour toi ? Surtout étant donné les problèmes actuels de l’industrie musicale : les groupes ne peuvent plus vivre de leur ventes d’albums et vivent surtout des lives donc il faut réussir à faire venir le public en concert.

Oui, c’est important mais c’est un vrai gâchis car du coup les seuls groupes qui marchent sont ceux ayant une image très forte mais pas forcément ceux qui font la meilleure musique. J’en parlais là par tweets interposés avec Barbara Carlotti, une chanteuse française. Et elle est de la vieille école, c’est-à-dire qu’elle a pu aimer des groupes ou des artistes qu’elle n’avait jamais vu, juste grâce à une intonation de voix, une ambiance, pour l’effet que le son produit sur elle et pas par une image.


Oui, les sentiments qui peuvent être évoqués par une musique.

Oui, et c’est aujourd’hui beaucoup perturbé par le discours esthétique un peu grande gueule que peuvent avoir certains artistes qui vont être plus connus pour leur image que pour leur musique.


Justement, les formats actuels de la musique et en particulier de la pop sont malheureusement influencés par ces tendances. On est un petit peu obligé d’avoir une image forte pour exister. Est-ce que du coup tu te forces à en avoir une ?

Non, je m’en fiche complétement. Justement je n’ai jamais eu d’image précise. Les gens savent qui ont est mais ne nous prenne pas du coup pour des sortes de mythes vivants, des sortes de personnages de film qui seraient aussi musiciens. Nous sommes juste une bande de personnes passionnées par la musique, l’aventure musicale. Et ça ne suffit pas assez à certains visiblement qui auraient besoin d’avoir une image précise pour accrocher. Certains groupes arrivent à avoir cette image qui prédomine, mais je n’aime pas trop ça.


Ça me fait penser à The Saber Tooth Tiger qui se produisait à Rock En Seine le même jour que toi si je me souviens bien. Beaucoup de personnes venaient voir Sean plutôt parce qu’il a une certaine  aura grâce à son père que pour sa musique. L’image du groupe compte de plus en plus donc ceux qui ne suivent pas en pâtissent.

Oui, voilà.


Vous ne cherchez pas à faire comme Breton par exemple où Roman pense beaucoup au visuel associé à leur musique, surtout étant donné que c’est son domaine d’expertise.

C’est exactement ça. On ne s’est jamais pris la tête, on a toujours aimé essayer des choses nouvelles et ne pas se cantonner à un seul truc. Et c’est pour cela qu’aucune de nos vidéos ne ressemble à une autre. Il n’y a pas de lien entre nos vidéos car j’avais juste envie de prendre du plaisir avec les réalisateurs avec lesquels je travaillais, même s’ils partaient dans des directions opposées. Pour moi ce n’était pas grave mais je me rends compte que le public s’associe à l’image d’un groupe bien avant de s’associer à leur musique. Donc il faut que je prenne ça plus au sérieux je pense.


Mais est-ce que ce n’est pas justement le fait de ne pas avoir une image fixe qui te permet d’avoir une plus grande liberté ?

Oui, mais je pense que cette liberté ne nous avantage pas. Il faudrait que j’accepte de jouer un peu plus le jeu de l’image. Il faudrait surement avoir une image plus définie pour que les auditeurs s’y retrouvent et aient des repaires plus clairs. Le public est, je pense, submergé par les informations sur le groupe et n’arrive pas à nous rattacher à une image précise. Je pense qu’il faudrait que je m’applique un peu pour simplifier les messages qu’on envoie au public et donc notre univers visuel. C’est un regret pour moi, personnellement car je suis friand de variété, de nouveautés.


Oui, parce que ça va limiter un peu tes possibilité.

Ouais, voilà. Je n’aime pas ça mais c’est vrai que ça avantagerait mon label que je sois plus facilement identifiable.


Que tu rentres plus facilement dans des cases : pop, rock, etc.

Ouais, faut cocher des cases.


En fait, tu déplores que le public ait besoin de repères très précis. Il faut dire qu’il y a tellement de groupe aujourd’hui que le public a besoin que l’on puisse lui décrire rapidement les artistes. Par exemple, telle personne, c’est un chanteur pop qui vient de tel pays.

Oui, je déplore le fait que le public ne soit pas plus curieux en fait. On manque beaucoup de curiosité maintenant.


Même en France ? Parce que beaucoup de chanteurs/groupes étrangers disent que le public français est plus curieux.

Ben beaucoup moins curieux que le public anglais. Quand je faisais des petits concerts à mes débuts, en 2005, je pouvais avoir 5 personnes dans des caves à Bordeaux et plus d’une trentaine quand je faisais pareil à Manchester.


Mais ça s’était peut-être aussi l’alcool qui faisait venir les anglais (rires).

Ouais, peut-être (rires). Non, non, je ne pense pas. Je pense qu’ils ont plus de curiosité. Ils ont un vrai côté dénicheurs de talents.


C’est vrai que la musique pop/rock fait partie intégrante de leur culture. Alors qu’en France, on a peu de groupes et surtout peu de groupes chantant en français. Est-ce que tu ne penses pas justement que ça te dessert de chanter en français  et que l’on comprenne tes textes ?

Non, au contraire. Je pense que la différence avec la Grande-Bretagne est qu’ils aiment être les premiers à découvrir des nouveautés. Alors qu’en France on commence à apprécier un groupe après qu’il soit déjà assez connu.


Une fois que ça a été validé, comme avec le label par exemple. Faire partie de Domino ça a dû bien aider en France.

Complétement, une fois que Domino nous a signés, les personnes ont commencé à se dire que le groupe devait être bien et valoir l’écoute.


Tu vas jouer vendredi avec Brigitte et Julien Bouchard. Je ne sais pas si tu connais Julien.

Non.


Tu dois connaître Brigitte.

Oui mais pas bien.


Leur univers est pop aussi mais plus glam et sensuel et puis très féminin. Est-ce que tu penses tout de même que ton univers peut se marier au leur ?

Oui, je pense qu’il est possible de marier des univers différents sur scène. Après, on verra comment ça se passera.


Je ne sais pas si tu as pu voir la sélection qu’il y avait cette année au festival.

Non, il y a qui ?


Par exemple, hier soir il y avait Gregory Porter, ce soir il y aura Sébastien Tellier, Jamaica, samedi Christine & The Queens. De tête c’est un peu compliqué de se rappeler de tous les noms. Est-ce qu’il y en a un que j’ai cité que t’aimerais voir en concert ?

Ben j’aimerais bien voir Sébastien Tellier. J’aime bien son univers.


Lui aussi est très porté sur l’image. Par exemple, je me rappelle quand il voulait créer son monde bleu.

Oui, il joue beaucoup sur l’image. Tellement qu’il va un peu trop à l’extrême maintenant.


Même si tu veux valoriser davantage ton image tu ne veux pas arriver à de tels extrêmes, c’est ça ?

Oui, ça ne me donne pas trop envie.


En fait, tu veux seulement mettre en avant une image précise pour simplifier le message que tu envoies aux auditeurs parce que ça s’impose un peu à toi.

Ouais, je pense que de la même manière qu’à un moment tu décides si tu veux utiliser une guitare ou un autre instrument, tu décides si tu veux mettre une image en avant ou une autre.


Et au niveau des projets futurs, je pense que ça va être pas mal de tournée.

C’est ça.


Et tu continues quand même l’écriture ? T’as des pistes pour un prochain album ?

Oui, on a déjà enregistré un EP sur des rythmes colorés plus africains qui sortira en janvier prochain.

 

 

 

Un grand merci à François et aux organisateurs du festival Nancy Jazz Pulsations d’avoir permis cette interview.

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